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Photo du rédacteurClément

La famille Begaud dans la Révolution

Dernière mise à jour : 25 mars 2020


La déroute de Cholet, huile sur toile par Jules Girardet, 1882

Dans toutes les communes et toutes les familles, la Révolution a causé de profondes divisions. C'est particulièrement vrai en Vendée et dans les départements limitrophes, lieux d'affrontements réguliers entre 1793 et 1796 entre les « Bleus », soldats de la République, et les « Blancs », rebelles « vendéens » de l'Armée catholique et royale.

Ce petit article propose de suivre le parcours d'une famille, les Begaud, originaires du Bas-Bocage, et de leurs relations, pendant cette période troublée de l'histoire de la Vendée1.

La famille Begaud

La famille Begaud présentée ici est issue du couple formé par Louis Begaud, « maître de pension et recteur », c'est-à-dire professeur laïc employé généralement par une paroisse, à Bazoges-en-Pareds, dans le sud du Bocage, fils de François, charpentier à Fontenay-le-Comte ; et son épouse Louise Pélagie Frouin. Les deux familles Begaud et Frouin sont catholiques, et présentes depuis des générations sur la paroisse de Bazoges.

Le couple a eut quatre enfants. Charles-Marie, l'aîné (né en 1763), embrasse une carrière ecclésiastique et est ordonné prêtre des cordeliers : il est théoriquement frères au couvent des Robinières, paroisse de Puy-de-Serre (Vendée), mais se trouve en fait en 1789 à La Rochelle, où il est aumônier des Dames Blanches de la ville. Le cadet, Benjamin (né en 1765), est chirurgien et exerce à La Chapelle-Thémer ; marié à Marie-Elisabeth Pineau en 1791, il n'a pas d'enfants. Le cadet, Louis (né en 1771), vit de ses rentes et est marié à Françoise-Thérèse Robin, dont il a deux fils. Enfin, une sœur, Marie-Louise, est marié à Jean Chevallereau, notaire de la baronnie de la Lande et de la châtellenie de La Chapelle-Thémer, résidant dans cette dernière.

Généalogie simplifiée des Begaud

La fratrie Begaud, tous rebelles

Au début de la Révolution, les Begaud sont discrets et seul le mariage de Benjamin, en 1791, les mentionne.

Le premier de la famille à se faire remarquer est l'aîné, Charles-Marie. En mars 1790, il est nommé vicaire de la paroisse de Saint-Sigismond. Il quitte ce poste le mois suivant, pour une raison inconnue, et retourne vivre à Bazoges dans sa famille. Réfractaire à la Constitution Civile du Clergé, il est aux Sables d'Olonne le 11 septembre 1792, où il s'embarque dans la Marie-Gabrielle en direction de l'Espagne - il est intéressant de noter que Jean-François Farget, vicaire de Bazoges-en-Pareds, prend place à bord du même navire... Passé de l'Espagne à l'Italie, Charles-Marie est retiré des listes des émigrés en 1799 à la demande de son frère Louis. Il rentre en 1803, s'installe d'abord chez sa sœur à la Chapelle-Thémer, puis devient curé de Thouarsais-Bouildroux et de Saint-Sulpice-en-Pareds. Il meurt en 1822, dans sa dernière cure à Saint-Jean de Fontenay.

Le cadet, Benjamin, exerce comme chirurgien à la Chapelle-Thémer. Il est arrêté à l'été 1793 pour appartenance au cercle royaliste de La Caillère. Jugé, il est condamné à mort le 21 novembre 1793 et exécuté le même jour, avec son cousin germain Philippe Micheau, ci-devant notaire de la Caillère et lui aussi membre du cercle royaliste.

Louis, le benjamin de la fratrie, reste dans un premier temps à Bazoges. Il devient même l'un des deux capitaines de la paroisse, chargé de mené les Vendéens de la commune au combat et de défendre la paroisse contre les Bleus. On ne connait pas son parcours militaire, mais il se trouve à Cholet lors de la défaite des Vendéens et il participe à la Virée de Galerne. Il rentre vivant, se marie en 1799 et s'installe à Fontenay-le-Comte, où il devient receveur de l'octroi de la barrière de péage du Bédouard, sur la Vendée. Il a eu deux enfants, Louis-Cyprien (1799-1872) et Charles-Louis (1803-1888), tous deux prêtres, et est décédé chez l'un deux en 1822.

Quant au père de famille, Louis Begaud, ci-devant maître de pension et recteur de Bazoges-en-Pareds, il est déclaré disparu dans l'insurrection. De même, on ne trouve plus de traces de son épouse Louise Frouin après les guerres de Vendée. Enfin, la fille de la famille, Marie-Louise, est encore en vie en 1803 puisqu'elle héberge son frère de retour d'exil. En revanche on perd la trace de son époux Jean Chevallereau pendant l'insurrection.


Des relations républicaines et révolutionnaires

Si les Begaud sont tous acquis à la cause vendéenne, on trouve dans leurs relations familiales plusieurs exemples de Républicains et de révolutionnaires convaincus.

Ainsi, Pierre-Joachim Bouilleaud. Fils d'un cabaretier de Fontenay, petit-fils par sa mère d'un tisserand, il devient lui-même tisserand et exerce dans la paroisse Saint-Nicolas, à Fontenay. Il se marie le 14 mais 1771 avec Jeanne Begaud, sœur de Louis Begaud, le recteur, et est donc l'oncle par alliance des trois frères rebelles. Dès le début de la Révolution, il intègre la Garde Nationale de Fontenay. Au printemps 1794 il est même nommé par Ingrand parmi les notables de la municipalité fontenaisienne récemment "épurée" de ses éléments trop mitigés. Il reçoit même un certificat de civisme le 12 floréal an II (1er mai 1794). Veuf en 1793 (Jeanne Begaud est disparue dans l'insurrection, mais il est possible qu'elle soit morte de vieillesse, étant née en 1736), il se remarie en 1794, divorce en septembre 1795 et se remarie une troisième fois à 54 ans, quelques mois après son divorce, avec Charlotte Moreau, 23 ans... On perd ensuite sa trace et il ne semble pas avoir survécu après 1800.

Plus mitigé semble-t-il dans ses opinions politiques, on trouve encore dans la famille Begaud un certain Philippe-Samuel Pineau. Il est le frère de Marie-Elisabeth et donc le beau-frère de Benjamin Begaud, le chirurgien. Notable de la ville de Fontenay, il en devient en 1793 l'un des juges du tribunal criminel. Il se désiste cependant lorsqu'il s'ait de juger et de condamner à mort son beau-frère et le cousin-germain de celui-ci, en novembre 1793.


On le voit, la famille Begaud a eu du mal à traverser la Révolution. La fratrie composée par Charles-Marie, prêtre réfractaire, Benjamin, chirurgien royaliste, et Louis, capitaine de paroisse, illustre l'adhésion de la famille à la rébellion vendéenne. Le devenir de leur mère, de leur tante paternelle et de leur sœur est flou, mais seule la troisième semble survivre à la période révolutionnaire. De l'autre côté du front, certains alliés de la famille comme Pineau et surtout Bouilleaud adhèrent rapidement aux idées révolutionnaires et intègrent le nouveau régime, en venant même à devoir affronter directement leurs parents, comme ce fut le cas lors du procès de Benjamin Begaud. Une famille parmi tant d'autres déchirée par la tourmente révolutionnaire.

Anciens remparts de Fontenay en 1825, depuis le Pont-Neuf, Octave de Rochebrune, A.D.V. 1 Fi 1087


1 Les renseignements sur les personnes citées ici sont principalement tirés du Dictionnaire des Vendéens, édité en ligne par les Archives départementales de la Vendée : www.vendeens-archives.vendee.fr

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